Les FTP

                        Les combats de Roquefixade ont pour cible le maquis FTP. Il est, donc, naturel de s’attarder sur cette structure, organisation armée que les communistes créent, après s’être regroupés à l’intérieur du Front National (qui n’a rien à voir avec celui de nos jours!).

                        La création:

                        Les FTP sont, pour l’essentiel, issus du P.C., actif dans le département depuis septembre 1939 où il est décrété illégal et dont les membres doivent souvent vivre dans la clandestinité. La direction nationale envoie, en Ariège, en mai 43, Roger THEVENIN alias « ALAIN », originaire du Jura, pour créer les premiers maquis. Jusqu’alors, des groupes épars existent mais sans structure: « les groupes légaux » ( formés de personnes qui avaient une activité salariée le jour et devenaient clandestins la nuit, comme à Pamiers où il en existaient 3). C’est ainsi que se crée le maquis de Rimont. Faisaient partie de celui-ci Alexis AUDEON alias « RENE »  (ancien des brigades internationales) et Achille BOCHETTO (narbonnais) qui furent tués le 18 septembre 43 à Pereille.  Puis, citons celui de Camarade qui sera anéanti le 17 Novembre 43 ou celui de Pereille fondé en Août 43.

                        Plus prés de Foix, se constitue un noyau de clandestins, à l’automne 43, sur les hauteurs de Mercus: Daniel PUJUILA, boulanger et militant communiste recherché, va se cacher, en compagnie de François ANDREU (employé de la SNCF à Narbonne), chez sa tante Marie PUJUILA. André LAGUERRE dit « DEDE la FRAISE », de Saint-Paul les rejoint avec Emile DUSSART dit « ANDRE DUVAL » ou « ROBINO », venu de Caen (et qui travaillait chez Noël SICRE, de Saint Paul).

                        Ils sont ravitaillés par Philippe AMIEL de Mercus, alors premier président départemental du Front National (issu de l’organisation spéciale du P.C.) et par son adjoint, Roger BUILLES alias « ROCHE », de Mercus (cheminot) qui deviendra responsable des FTP de la zone Amplaing, Mercus, Tarascon. La direction des FTP envoie « OSCAR », fin Février 44, à Croquié, pour former avec ce groupe, une unité de combat.  Les premières armes arrivent (Revolvers, grenades, dynamite)….Ce maquis prend le nom de « Bochetto » et sera à l’origine de la Cie FTP de Ariège après l’arrivée de CALVETTI Amilcar dit « LOUIS » ou « Jean TORRENT » et Benito PEREZ dit « OSCAR ».

                        De petits maquis, formés essentiellement de rétractaires au STO ou de militants recherchés, se créent de plus en plus. L’hiver 43-44 s’avère rude et montre les difficultés de ravitaillement et d’organisation. La sécurité devient difficile à assurer. L’on dénombre plusieurs morts lors d’affrontements (Le Port: le 9 septembre 43; Pereille: le 18 Septembre 43; Camarade: le 17 Novembre 43).

                        C’est ainsi que la Direction Interrégionale du P.C. décide d’organiser les maquis en Ariège. En avril 44 arrivent:

                        – Marcel FRECHOU alias « CADERO », tarbais, responsable politique et commissaire aux effectifs régional (CER) ;

                        – Manuel SERRA dit « GODEFROY », responsable militaire (COR)

                        – Louis GABARRE dit « GILBERT », commissaire technique (CTR)

                        – Léon JOSSELEVITZ dit « JACKY » (parisien),chargé du recrutement

                        – Vincent VERDUCCI alias « ANDRE BARRERE », charge des services de renseignements

                        et surtout

                        – Amilcar CALVETTI alias « LOUIS » ou « JEAN TORRENT », sétois, arrivé le  15 Avril, en charge des maquis ariégeois et de leur organisation (CO).

                        Le tout est coordonné par André LACOSTE dit « ABEL » qui arrive le 27 Avril 44, responsable du P.C. clandestin pour l’Ariège, et Jean LABORDE ( de son vrai nom Casimir LUCIBELLO : comme CALVETTI, il était sétois et devint après guerre responsable national de l’ARAC) à l’état major de Toulouse (commissaire aux effectifs interrégional).

                        La tactique des FPT est celle dite de « La Boule de Mercure » : de petits maquis aux effectifs réduits, mais très mobiles, agissants en plusieurs points géographiques , de sorte d’être insaisissables et portant à croire à une vaste organisation.         

                        Le maquis était « l’avant garde de l’armée de Libération » comme défini dans le « programme d’action en Conseil National de la Résistance » (15 Mars 1944). Cependant, chaque groupe conserve sa liberté d’action, en fonction de ses moyens et de ses objectifs, mais dans le cadre de la stratégie définie par les autorités de la Résistance et des Alliés.

                        CALVETTI visite tous les maquis et rejoint Croquié. Il fait de Daniel PUJIELA alias « ANDRE  FAURE » son adjoint.

                        Après quelques actions à Mercus et Saint-Paul, il est décidé, fin mai, de se rapprocher du groupe de guérilleros se trouvant aux alentours du Merviel et de Vira (où existe un groupe FTP sous le commandement d’Aimé GOS, meunier de son état).

                        Deux actions sont décidées:

                        – Coordonner les différents maquis et collaborer avec les guérilleros espagnols. C’est ainsi que se fait un regroupement, à Vira, des groupes de Pamiers, Croquié, de ce qu’il reste de Camarade et de Pereille, soit environ 30 hommes.

                        – Créer un organe de presse, lien avec la population pour faire contrepoids à « La Dépêche » (alors pro-Vichy): ce fut « Le Patriote Ariégeois » (dont le premier n° est distribué gratuitement vers le 15 mai 44).

                        Dans le même temps, Camille SOUYRIS, alias « AUBERT »[1] devient chef départemental  des F.F.I. et met en place un commandement unique contrôlant l’ensemble des mouvements de résistance.

                        Les FTP, autour de CALVETTI, créent la 1ere Cie de l’Ariège ayant plusieurs sections (comme celle du Couserans avec René PLAISANT).

                        Le 6 Juin, CALVETTI lance un appel à la mobilisation et à l’insurrection: environ 150 jeunes arrivent à Vira pour s’engager. La Cie n’ayant d’armes que pour environ 80 hommes, beaucoup sont renvoyés chez eux tout en étant disponibles… C’est ainsi que les FTP légaux (vivant, antérieurement, chez eux mais affiliés à l’organisation) deviennent des FTP clandestins devant vivre au sein d’un groupe armé.

                        A partir du 6 juin, l’organisation de la Cie comprend:

                        – 3 détachements ( ou sections) ayant chacune 25 personnes environ;

                        – chaque détachement comprend 3 groupes de 8 personnes environ;

                        – de plus, existe un détachement « hors rang »: c’est la section de commandement, avec le personnel du ravitaillement, de la cuisine, de l’infirmerie…

                        La Cie est commandée:

                        – par un commissaire aux effectifs

                        –   »        »           »   aux opérations

                        –   »        »           »    technique.

                        Plus tard, les FTP formeront plusieurs compagnies:

                        – la 3101 ( sur la base des groupes de CALVETTI, puis de SANNAC)

                        – la 3102  ( René PLAISANT, dans le Couserans)

                        – la 3103  ( René BURG, dans le Pays d’Olmes)

                        La structure FTP est de type militaire (donc avec ses règles). Cependant, vivant dans la clandestinité, les engagés doivent prendre des noms de guerre. Ceux qui y rentraient devaient déchirer leurs papiers et prendre un nouveau nom ( et donc faire oublier le vrai). Seuls ceux qui se connaissaient antérieurement savaient la vraie identité des uns ou des autres.

                        Les maquis FTP n’étaient pas des groupes isolés, sans réseaux. Des points d’appui aidaient à la logistique. Citons une base arrière importante pour le groupe FTP ayant eu leur action dans le carré Pamiers- Mirepoix- Lavelanet- Saint Paul: le domaine de Bonrepaux, prés de la Tour du Crieu. La ferme – dont les métayers étaient les AMARDEILH (dont certains membres seront à Roquefixade) – servaient de boites à lettres, les ordres y transitaient, une partie de l’élaboration des premiers exemplaires du « Patriote Ariégeois » y fut fabriqué (sans oublier la ferme Lafitte). Elle servit de « planque » autant aux réfractaires du STO que pour cacher certains butins pris à l’opposant: par ex., le tabac pris à Pamiers a été mis dans la grange sous la paille, les chaussures dans la cuve où ils faisaient fermenter le vin…

                        Des militants ont servi de boite à lettres, de refuges, de lieu de rencontres, d’agents de liaisons…. Citons quelques noms parmi d’innombrables: Anna CERNY, Madeleine PUJOL (soeur d’Emile DARAUD), à Pamiers; Rémy MAURY à Vira; Marie PUJIELA à Croquié, Noël SICRE à Saint-Paul, Me PRAT à Bélesta, Mmes MIROUZE et DELQUIE, à Ventenac… Sans compter tous ceux qui ont aidé au ravitaillement (agriculteurs ou pas)… et qui se sont cotisés pour financer les opérations en cours…

(Extrait du livre : « Le Maquis de Roquefixade », J.J. Pétris)


 

 

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[1] « AUBERT » : envoyé en Ariège par l’Etat Major régional FFI, dirigé par RAVANEL (24 ans), dont le chef national est le Général Koenig. Il a pour mission de coordoner l’ensemble de la résistance ariègoise en vue de la Libération. Il avait comme agent de liaison « SUZANNE » qui devint, plus tard, l’épouse de José ALONSO (commandant ROBERT)