Département de l’Ariège, Arrondissement de Foix ; Canton de Montgailhard

Altitude : 470 / 1093 m

Longitude : 1° 41’ 12’’ E

Latitude : 42° 55’ 01’’ N

(Carte: Conseil Général de l’Ariège)
 


Surface 
: 1027 ha

Démographie :

1806 : 521

1851 : 608

1856 : 523

1901 : 346

1921 : 261

1946 : 185

1968 : 138

1975 : 122

1982 : 135

1999 : 134

2006: 121

Étymologie : De « cella » pour « cellule » (faisant allusion au monastère) ou « cella » pour « grenier »

Nom des habitants : Cellois et Celloises


Approches historiques
 :

Le village de Celles (en Ariège) est fondé par l’Abbaye de Saint Sernin de Toulouse sous le vocable de Saint-Michel de Celles et ce, avant l’An Mille.

Deux bulles des papes Gélase II (2 janvier 1119) et Alexandre III (11 mai 1168) confirment la puissance de l’église de Celles qui est, aussi à l’origine de la création de la paroisse de Saint-Paul de Jarrat tout proche.

Nous retrouvons Celles dans l’hommage de Bernard Amiel de Pailhès, le 22 janvier 1243, à Raymond, comte de Toulouse pour les terres de Roquefixade, Nalzen, Celles, Soula, Leychert, Saint-Cirac et En Rivière (Cela se passe, donc, après le traité de Paris. Il est à remarquer que les localités énoncées seront en Languedoc et formeront la châtellenie de Roquefixade, autrement dit de la Vallée de Lesponne).

Cependant, un texte mentionne que Celles possédait le territoire de Caraybat qui fut vendu à la famille de Lorde le 3 avril 1246. D’autre part, Celles sera distincte de la châtellenie de Roquefixade et appartiendra jusqu’en 1647 à la famille de Ferrouil.

C’est pourquoi, nous pouvons avancer que Celles fut à un moment donné de son histoire une enclave entre le Comté de Foix (auquel le domaine est historiquement attaché au moins jusqu’en 1243) et la Province du Languedoc (à laquelle la seigneurie de Celles sera reliée).

En l’an 1647, la famille de Ferrouil vend le fief de Celles à la famille de Lestang par le biais de l’évêque de Carcassonne, Christophe de Lestang (ami de Louis XIII et de Louis XIV).

Le 30 septembre 1652:   Mort de l’évêque Messire Vital de Lestang. Son neveu, Vital de Lestang hérite de la baronnie

Le seigneur de Celles sera jusqu’à la Révolution seigneur engagiste, par contrat, de la châtellenie de Roquefixade (Nalzen, Leychert, Soula et Roquefixade) qui était domaine du roi de France.

Le conflit de la Régale qui oppose le roi Louis XIV à l’évêque Caulet marquera Celles : les agissements de son seigneur, Ignace de Lestang, contre le curé du lieu, qu’il fait mettre en prison au motif qu’il soutient son évêque contre le roi, fera l’objet d’un rapport auprès du pape. C’est à ce moment que sont annoncées les apparitions de la Vierge, en 1686, dont aurait bénéficié Jean Courdil, jeune agriculteur dépendant du château de Celles. A ce moment-là, le fief de Celles se trouvait dans la Province du Languedoc, en limite du Comté de Foix ; mais dépendait du diocèse de Pamiers.

La révolution verra l’émigration de la famille seigneuriale en Espagne et son château changer de main ; La chapelle de Celles sera, aussi, vendue comme bien national ; alors que l’église du village, se trouvant alors dans le château restera paroissiale.

Selon F. Baby, Celles connut ses « Demoiselles » lors de la révolte contre le code forestier promulgué en 1829.

Industries anciennes :

Une forge à la catalane se trouvait dans l’enceinte du château des seigneurs de Celles (des vestiges existent toujours).  Les familles Fornier de Savignac et Astrié la possédaient au XIXème. Un martinet, proche du lieu-dit Les Icarts fonctionna jusqu’au début du XXème siècle.

Deux carrières (pierres à meuler et à bâtir) furent exploitées.

Moulin à plâtre ; moulin farinier; poterie au lieu-dit La Tuilerie (qui était à cheval sur les domaines de Saint-Paul et de Celles).


Chapelle ND de Celles et ses apparitions:

« Vous êtes sur un site unique en Ariège …

En effet, l’origine de cette chapelle- qui, comme vous le voyez a plutôt l’allure d’une église- remonte au temps de Louis XIV. C’est durant son règne qu’une apparition de la Vierge sur ces lieux est annoncée. Nous sommes en 1686. Par comparaison, les apparitions de Lourdes ne datent que de 1856.

L’origine de cette « chapelle » tient à cette « apparition » et aux « guérisons » consécutives à celle-ci….

Deux enquêtes de l’époque nous relatent les circonstances de cette apparition.

Que disent ces documents ?

Le fils du métayer du seigneur de Celles, Jean Courdil, était allé, le matin, travailler à un champ de millet gros, c’est-à-dire du sarrasin. Il remonte vers sa maison (située au dessus de la chapelle actuelle, dont il ne reste, actuellement, que des ruines). Il aperçoit une colombe qui se dirige vers la fontaine et qui se transforme en une jeune fille. Surprise ! Cette enfant au départ, dit l’une des enquêtes, devient une jeune femme et lui dit de ne pas avoir peur et qu’elle est la sainte Vierge. Elle s’arrête près de la fontaine… Tous deux, Jean Courdil et la sainte Vierge, se mettent à genoux…

Une discussion s’en suit… La sainte Vierge dit à Jean Courdil que les habitants de Celles doivent « se convertir » et faire huit processions…

Cette appellation « se convertir » ne veut pas dire changer de religion ou de croire à quelque chose… mais de changer sa façon de voir  et de vivre…

Pourquoi cette allusion ? Pourquoi cette demande de changement de vie ?

La sainte Vierge donne l’explication… Le village de Celles est confronté à la zizanie… Quatre femmes ont battu le curé ! Si elles veulent aller au ciel, dit-elle, il faut qu’elles se repentent…, d’autant plus que d’autres personnes innocentes sont comprises dans cette affaire. (Ce passage concernant le curé battu, bien inscrit dans les documents d’origine, a toujours été écarté dans les divers écrits consacrés à l’apparition…!).

Pourquoi a lieu cette bastonnade?

La réponse est dans l’histoire de France et dans celle du diocèse de Pamiers. En effet, en ce temps-là, le roi de France, Louis XIV veut nommer lui-même le successeur de l’évêque qui vient de mourir et cela contre l’avis du pape (qui, en tant normal, le nomme) et récupérer les revenus de l’évêché durant la vacance  : c’est ce qu’on appelle l’épisode de la Régale. On se retrouve donc en présence d’un évêque nommé par Louis XIV, alors qu’une grande partie des prêtres du diocèse ne veulent pas le reconnaître (il y en aura plusieurs successifs sans le consentement du pape de 1680 à 1693…).

Un autre élément est à prendre en compte : le seigneur de Celles de l’époque est très lié au roi de France. C’est ce seigneur qui gère le domaine du roi autour de Roquefixade… De plus, la famille de ce seigneur a ses entrées à la cour du roi de France. Or, ce seigneur est en opposition avec son curé resté fidèle au pape et qu’il fait arrêter et emprisonner… ! Un nouveau curé arrive et se fait bastonner… ! Il aurait, selon un rapport rédigé au Vatican, des mœurs, disons, légères et monnaye les sacrements…

Enfin, autre élément dans cette affaire, il y a une bataille d’idées et d’influence entre Jésuites (proches des positions du roi) et celle des Jansénistes qui s’opposent aux Jésuites… Sans rentrer dans le détail, c’est dans ce climat que sont annoncées ces apparitions…

Mais ces précisions ne sont pas dites dans les documents… C’est la recherche historique qui peut nous éclairer sur le sujet…

Revenons aux enquêtes effectuées…

Donc, le message de la sainte Vierge est clair : il faut ramener le calme à Celles ! Elle demande, donc, à Jean Courdil d’aller en avertir le peuple… !

La sainte Vierge lui demande, aussi, de laisser la bêche qu’il portait à l’endroit où ils se trouvent  et de la faire chercher, dit la 1ère enquête, par son frère (son frère et sa sœur, selon la seconde enquête, y seraient allés, après son retour à la métairie). La bêche est retrouvée sur les lieux avec, au bout du manche, une croix faite de trois feuilles de chêne.

Jean Courdil fait ce que lui a demandé la sainte Vierge : Des processions de repentance ont lieu…

Quelques temps après, une seconde apparition au même Jean Courdil a lieu. Au cours de celle-ci, la sainte Vierge remercie le voyant d’avoir accompli sa mission et annonce que la source sera « bonne ».

Dans les deux enquêtes qui sont réalisées alors sur les circonstances de ces apparitions, des dizaines de cas de guérisons sont remises aux enquêteurs : l’origine en est l’eau de la fontaine située au lieu de l’apparition.

Dès lors, c’est l’affluence : l’on vient de partout (Montaillou, Chalabre, Gajan…) en pèlerinage sur ce lieu où il se fait des « miracles »…, en particuliers en utilisant son eau ! L’on monte, déjà, la côte à genoux… (Détail donné dans la 1ère enquête)!

Quelques mois après ces évènements, il est décidé de construire une chapelle qui est bénie en 1695, soit 9 ans après cette apparition.

NB: Cette bénédiction n’a pas été effectuée par l’évêque de Verthamon, -comme certains s’ingénient à le dire! et cela contrairement aux textes-, mais par son vicaire général: la situation à Celles entre le fait de la Régale et la question de l’apparition qui y est relatée lui posant problème (d’ailleurs, dans le texte de la bénédiction, il n’est pas fait une seule allusion aux apparitions!). Cependant, Mgr de Verthamon viendra à Pla Rouzaud en 1700, comme il l’a fait pour toutes les églises du secteur: dans son rapport, il ne fait allusion qu’au comportement du curé de Celles et à rappeler ses règles sur la confession…

Depuis, d’autres « miracles » sont attribués à ce site…

Mais,… les circonstances historiques de l’époque ont fait que le Vatican n’a jamais pu se prononcer sur le cas des apparitions de Celles ! D’abord, les textes des enquêtes ne sont jamais parvenues à Rome et sont restés à Pamiers, enfermés dans un coffre… Seules les circonstances du conflit entre le seigneur de Celles et de son curé (mentionnés dans les documents sur le conflit de la Régale de Louis XIV) sont dans les archives vaticanes… Enfin, la validation d’une apparition, à l’époque, n’est pas la même qu’actuellement : jusqu’au milieu du 18ème siècle, il n’y avait pas de règles précises…

Donc, si la chapelle de Celles n’est pas connue (à cause de ces événements historiques que nous venons de relater rapidement) : c’est de la faute à Louis XIV !!!

Un mot sur l’édifice…

Nous ne savons rien sur la chapelle d’origine… si ce n’est un document relatant un don conséquent d’une femme noble de Chalabre. Les recherches effectuées dans une centaine de registres notariés sont restées infructueuses. L’on peut penser que l’acte de commande (matériaux, dons, maçons et charpentiers) de cet édifice ait pu être passé chez le notaire de Saint-Paul… Or, ses registres ont disparu…

Nous n’avons pratiquement rien dans les archives concernant le 18ème siècle. Le chemin de croix a du être réalisé durant ce siècle (il n’est mentionné, pour la première fois, que par le cadastre napoléonien). Il faut attendre la moitié du 19ème pour avoir une description, au moment où de gros travaux sont entrepris…

Cette restauration comporte le déplacement de la fontaine (qui se trouvait sous la chapelle) à l’endroit où elle se trouve de nos jours. L’allée où se trouve cette même source était bâtie : elle a été démolie c’était un péristyle donnant sur l’entrée de la chapelle qui se trouvait dans l’actuelle chapelle dite des apparitions (où se trouve la pierre sur laquelle la sainte Vierge serait apparue). En outre, la chapelle a été surélevée… Des aménagements effectués…

L’on sait que des dons de toute la France sont arrivés à Celles pour cette entreprise (Saint-Brieuc, Strasbourg…). La population a donné du temps pour monter les matériaux avec des bœufs par le chemin escarpé de l’actuel chemin de croix extérieur qui part des Iccarts à la chapelle.

A noter que tout cela a été le fruit du travail d’organisation et de collecte de fonds par le curé François Mouychard qui, en plus, fera construire l’église de Celles. Notons, aussi, que le chef de chantier était de  Saint Paul…

Le 20ème siècle ne voit que des réparations ponctuelles (suite à Vatican 2, ou après des tempêtes). Une souscription avait été lancée par le dernier chapelain et curé en titre de Saint-Paul, l’abbé Raoul Sablé : sa mort (1995) a retardé les travaux envisagés.

En 2000, devant les dangers engendrés essentiellement par la toiture, la commune (à laquelle appartient l’édifice) décide de le fermer par sécurité. Depuis, après maintes études, des travaux importants et essentiels ont été réalisés… :

Nous sommes donc devant le témoignage d’une œuvre (œuvre humaine pour tous ; œuvre spirituelle pour certains…) entreprise il y a plus de 300 ans et qu’il appartient à notre génération de sauvegarder… »

(Texte et étude de J.J. Pétris à l’occasion de la marche populaire organisée par le Club Léo Lagrange de Saint-Paul le 25 juin 2006)

Depuis la rédaction de ce texte, la toiture de la chapelle a été entièrement refaite, les murs décapés et jointoyés, les voûtes consolidées, etc… En 2008, la chapelle est réouverte au public… Les travaux continuent au rythme des arrivées des dons…

Une association s’est constituée pour œuvrer en vue de sa restauration


Patrimoine :

– Le château de Celles dont les caves sont millénaires (un sondage les estiment au 9ème siècle) ; Plafonds peints du XVIIème siècle

– La place dite des Ormeaux avec sa plantation de platanes en forme octogonale est site inscrit.

– La chapelle ND de Celles, perchée sur la colline de Pla Rouzaud, et sa fontaine à laquelle sont rattachées de nombreuses guérisons.

– L’église de Celles, sous le vocable de Saint-Michel, est l’une des plus récentes d’Ariège (bénie en 1881).



– La Borne Languedocienne délimitant le Comté de  Foix de la Province du Languedoc:

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Célébrités :

– La famille De Lestang, seigneurs du lieu jusqu’à la Révolution (alliée aux Foix-Rabat et aux Villemur)

– Germain Authié, sénateur de l’Ariège, né à Celles le 30 mars 1927, mort en 2001.

François Mouychard, curé, reconstructeur de la chapelle ND de Celles et bâtisseur de l’église Saint-Michel de Celles.

Benjamin Aillaud:  Né à Grasse le 22 janvier 1976 (avant sa venue à Celles en septembre de la même année); avec son frère, Pétrouchka, devient vice-champion du monde d’attelage à Leipzig (course d’attelage – tous-terrains -de chevaux) le 20 janvier 2008 (après plusieurs titres aux championnats de France ou d’Europe): pour l’anecdote, c’était la première fois qu’un attelage français accédait à une coupe du monde…

                 (Photos: famille Aillaud)


Pour en savoir plus…

Cartulaire de Saint Sernin

« Les grès de Celles et de Labarre » par Jules Grégoire

« ND de Celles, près de Foix » : Justin Doumenjou (1859)

« Un sanctuaire ariégeois : ND de Celles » : Joseph Rouzaud  (1909)

« Notre Dame de Celles », Robert Jalbergue (1984)

« Le chemin de fer en Vallée de Lesponne », J.J. Pétris : ADA Z° 2442

« L’église Saint-Michel de Celles » : JJ Pétris (ADA: ZO 2464)

Plans divers et dossiers : ADA 2 O 483 à 487 (foyer populaire, construction de l’église,…)


(Étude : J.J. Pétris)